Le CAR est un regroupement indépendant sans but lucratif qui produit des recherches approfondies et encourage le dialogue sur des dossiers chauds auxquels est souvent confrontée l’industrie et les impacts de ces dossiers sur l’économie et la société américaines. Le CAR est le plus important site privé d’essais dans le domaine des automobiles et des camions et Centre est sous la supervision de l’université Ohio State. Dans son analyse, le CAR stipule que ses évaluations sont conservatrices et sous-estiment les impacts réels sur l’économie américaine si l’administration Trump y va de l’avant avec l’imposition de tarifs dans l’industrie automobile.
Les simulations ne tiennent pas compte de l’expansion potentielle de la production de véhicules et de composants aux États-Unis si jamais des tarifs étaient imposés et que cela contrerait une partie des dangers émanant des restrictions commerciales. Selon CAR, cette hypothèse ne saurait se réaliser étant donné qu’à peu près la moitié de la capacité de production est présentement disponible à cause de la tendance des consommateurs à s’éloigner des voitures de passagers. À moins que les consommateurs américains changent leurs habitudes d’acheter des produits importés de tout type et de tous les segments de marché et décident d’acheter des véhicules américains, la cadence des usines américaines n’augmentera pas rapidement. La conversion d’une usine sous-utilisée pour construire un nouveau produit ne se fait pas du jour au lendemain, il faut compter un bon deux ans du début de la construction au début de la production, selon le CAR.
Dans le cadre de ses analyses, le CAR a étudié six scénarios différents :
- Tarifs de 25 % sur toutes les automobiles et les pièces importées aux États-Unis.
- De tous les partenaires.
- De tous les partenaires avec des exemptions pour les importations du Canada et du Mexique.
- Tarifs de 10 % sur toutes les automobiles et les pièces importées aux États-Unis.
- De tous les partenaires.
- De tous les partenaires avec des exemptions pour les importations du Canada et du Mexique.
- Des quotas au lieu de tarifs, établis à 80 % des volumes de voitures importées en 2017 et 80 % de la valeur des pièces importées en 2017.
- Appliqués à toutes les importations.
- Exemption accordée aux importations du Canada et du Mexique.
Selon le CAR, en se fiant aux quatre scénarios de tarifs, le prix moyen pour un véhicule vendu aux États-Unis augmenterait de 980 $ (scénario 2b) à 4 400 $ (1a). Pour les véhicules qui sont à la fois construits et vendus aux États-Unis, les hausses de prix sont moindres, de 455 $ à 2 270 $ alors que les tarifs ne s’appliquent qu’au contenu de composants importés. Les consommateurs américains à la recherche d’un véhicule importé devront débourser de 1 345 $ à 6 875 $ de plus par véhicule. Si les États-Unis imposaient des quotas, les augmentations seraient de 760 $ à 6 610 $ par véhicules. Ces hausses, quelque soit le scénario, engendreraient des pertes d’emploi oscillant entre 82 000 et 750 000, et la réduction du PIB serait de l’ordre de 6,4 à 62,2 milliards de dollars.
Le rapport du CAR indique que de 29 000 à près de 118 000 emplois seraient perdus chez les concessionnaires de véhicules neufs. Cet impact se traduit par des pertes de revenus de 16,3 à 66,5 milliards de dollars ou 2.5 % à 10.3 % de tous les emplois chez les concessionnaires. Il est important de souligner que ces impacts négatifs par rapport aux tarifs qui pourraient être imposés, ne sont pas répartis uniformément à travers les marques de véhicules et les manufacturiers. Certains véhicules assemblés aux États-Unis ont une faible proportion de contenu nord-américain et américain. La moyenne de pièces faites aux États-Unis pour les véhicules assemblés aux États-Unis est de 60 %.
Dans un article du Washington Post traitant du fait que la ville de Columbus en Indiana, bastion du vice-président des États-Unis Mike Pence, serait une des plus dûrement touchée si jamais l’administration Trump procédait avec l’imposition de nouveaux tarifs, Tom Linebarger, PDG de Cummins Motors, le plus important employeur de l’endroit, affirme : « Il est certain que l’escalade de cette guerre commerciale affecte notre capacité d’importer des pièces d’autres pays et nous complique la vie pour exporter nos produits à cause des droits de représailles imposés par d’autres pays. Tout cela pourrait nous forcer à effectuer des mises à pied dans un proche avenir. »
Les manufacturiers américains de véhicules et de pièces d’autos ne bénéficieront pas des tarifs ou des quotas car tous les véhicules fabriqués au États-Unis comportent une proportion importante de composants importés alors qu’une part importante des pièces fabriquées aux États-Unis est exportée pour être assemblées dans des véhicules construits dans d’autres pays. En 2017, près de 70 % des exportations de pièces américaines l’ont été vers le Canada et le Mexique et c’est pour cette raison qu’inclure ces deux partenaires dans une guerre commerciale serait particulièrement néfaste pour les manufacturiers américains de pièces.
Si des tarifs ou des quotas voient le jour, le CAR prévoit que la demande pour des véhicules neufs diminuerait de 493 600 à 2 000 000 de véhicules et cette décroissance est associée à des pertes d’emplois variant des plus de 82 000 à 750 000. De telles données représentent une réduction du PIB américain de 6,4 à 62,2 milliards de dollars. Et ces chiffrent n’intègrent pas les 17 000 concessionnaires de véhicules neufs aux États-Unis qui fournissent de l’emploi à plus de 1,1 million de personnes dont le salaire moyen est de 57 000 $ (National Automobile Dealers Association, 2017). Selon CAR, il pourrait y avoir de 28 800 à 117 500 pertes d’emplois dans ce secteur qui enregistrerait des pertes de revenus de 16,3 à 66,5 milliards de dollars si jamais le gouvernement américain y allait de l’avant avec des tarifs sur l’automobile. Plusieurs autres intervenants de l’industrie ont produit des analyses avec sensiblement les mêmes résultats et espèrent qu’ensemble ils auront su convaincre qu’il n’y aurait aucun gagnant si jamais la menace de tarifs devenait réalité.
Par Guy Hébert